mercredi 29 juin 2005

Sous le signe de la ligne de partage

Cluny-Aulas, c’est passé si vite !

Dans la France du non où il fait si bon vivre – quand on ne s’y attarde pas ? – avec des prix pas encore gonflés par les commerciaux de tout poil et les avides de gains.

Nous n’étions qu’avides de sensations, d’horizons, de dénivelées, de kilomètres, de noms, de mots, d’étourdissements, de sublime et d’abrutissements… Il nous faudra bien un jour décrire cette jouissance de la torpeur acquise grâce à la montée inflexible d’un col sous un soleil intransigeant.

Autant pour moi, au temps pour moi, autant en emportent le vent et le soleil. Et la mer, de concert et de conserve, à vue ; conversation-conservation freddoïste.

Brûlé au pas de la Sue, à terre à la Croix d’Auterre, récitant mon alphabet au col de la Cépée, j’arrivai en quelque vague état de délabrement chez les Sauvages qui nous accueillirent comme des princes. Didier avait déjà mis dans un roncier notre ami Fred au col de la Bûche et Fred commençait à faire du freddisme.

Traités de vieux à St Forgeux, nous nous rebiffions et portions gaillardement nos croix à travers Mazieux, Part et Chaubouret pour survoler Grand Bois, un coin de St Régis et atterrir à Montfaucon en Velay, d’abord dans un hôtel qui n’était pas le nôtre puis dans le nôtre que quelques rares voitures traversaient la nuit, nous réveillant en sursaut. Et Fred faisait toujours du freddisme.

Après une bonne danse à Tence, et une douloureuse pour notre Freddo, nous rechargions les batteries au col du même nom, débrayions à St Agrève et faisions provisions de bonne bouffe à Fay/Lignon avant d’attaquer la Croix de Peccata. J’eus le front d’aller à St Front sans passer par le lac du même nom. Là, trois itinéraires, trois groupes. Have a good trip back, Fred ! La directissime pour Eddy Pancarte qui rentrait à la bergerie sans payer par les Estables et le Béage. Cricket, Paul et votre ci-devant scripturaire foncions vers le nord, bifurquions à Borée pour dévaler la magnifique descente vers St Martial, grignotions le col de Joux, vert mais pas très plan, et voguions sur la superbe et grandiose corniche qui mène du col de Joux à Lachamp-Raphaël. Là, une bourre inattendue avec un régional qui nous avait fait un coup de jarnaque. Cricket ne veut pas du Gerbier et craint les Coux qu’il contourne par le sud. Après avoir tutoyé le Gerbier, nous sommes prêts à mourir. Mais ce n’est pas encore notre heure, car foudroyés à la Ceyte, juste après Cagnard, au passage de la Loire, nous nous en sortons sans même une brûlure. Plutôt victimes d’une cinquième glaciation que nous surmontions en franchissant bille en tête les obstacles qui nous séparaient encore du Lac d’Issarlès. Lieu paisible par excellence où nous régénérions fibres et lymphes.

Pour moi, c’est la journée de repos, il faut bien s’y coller, et donc 10 cols et 105 km en 3 phases. Les alentours des lacs, Issarlès et la Palisse, sont superbes. A Loubaresse, je trouve des cyclosophes en train de dévaliser le malheureux bistrot. Comment vont-ils pouvoir monter à St Laurent puis au col du Goulet avec de tels lests dans leurs organismes engourdis ? et bien, envers et contre tout, ils montent. Le cyclosophe est un devant-monter qui monte. Du Bleymard à Aulas, c’est la plus longue, la plus mouvementée mais aussi la dernière. Un Lascar déchaîné dans la descente du Pont de Montvert hurle à la savate. Un Freddo attendri les lui rendra. Le gradient de but agit comme un aiguillon – et pourtant on en voudrait encore. Ressourcés, nous le sommes par toutes ces eaux où nous avons puisé : sources de la Loire, de l’Allier, du Lot, du Tarn, du Gardon… Arrivée tardive à Aulas en notre meilleur gîte de la semaine, Chez Carmen et Dimahi. Mt Lozère et Mt Aigoual dans la même journée, plus une vingtaine de cols, on atteindrait presque au sublime en franchissant Clerguemort, Fontmort et le Malpertuis sans encombre. Rey, des Faisses donnent une suite plus triviale que la Cravate n’étranglera pas. Et Fred refait du freddisme.

Certes, la compétition n’a pas été rude. Délaissée ou réprimée sur la route, elle s’est faite dans les coulisses. S’emparer de la meilleure chambre, être le premier à la douche ont tenté de s’imposer comme les valeurs d’un libéralisme rampant. Mais la France du non a mis un frein à cet accaparement capitalistique des profits personnels et les valeurs collectives de partage ont rapidement repris le dessus. Effets subtils de la ligne de partage des eaux. Et nous dirons ici notre dette à un autre cyclosophe, d'Aubenas, dénommé biki-the-biker, concepteur d'un brevet 100 cols sur la ligne de partage des eaux.

Alors des chiffres : 769 km. 50 nouveaux cols. 13 485 m de dénivelée. 10 BPF. Une semaine réglementaire de 35h 17’.

147 l d’eau. 5 kg d’abricots. 7 kg de nectarines. 3 kg de bananes. 200 g de frites. 70 cocas. Une portière avant droite. Quelques cm² de peau brûlée. Côtes du Rhône, Beaujolpif, vins d’Ardèche et du Langudoc. Une roue arrière Vento et 67 pressions. Sans oublier quelques décimètres-cubes de faisselle.

Un très bon cru.

mercredi 15 juin 2005

nouvelles du front

Samedi 18 juin, l'appel est à 8h30 Boulingrin La ligne de partage des eaux : Cluny-Aulas c'est du lundi 20 au vendredi 25 juin Départ chez Fred Legardinier, route de Darnétal, le dimanche 19 juin à 13h La folle journée serait le samedi 2 juillet départ 6h Boulingrin, arrivée 21h50 quelque part les vacances c'est bientôt la rentrée c'est après le travail n'en finit pas On ne se compte pas Si c'était à refaire je ne sais pas ce qu'il faudrait faire chemin faisant pas plus tard qu'hier demain est un autre jour c'est rien du tout, c'est tout

jeudi 2 juin 2005

y a pas que le vélo dans la vie ?

Y aussi l'Europe qui pédale ovale avec un cadre référendaire en carbone, et puis y a aussi Madeleine qu'est belle comme un volcan qu'on croyait trop vieux et elle aimera ça, y'aura des frites avec des moules et du bon vin, allez viens jeff, si c'est pas sûr c'est quand même peut-être, faut voir, oui la conquérante c'est dimanche ou samedi et ça part à quelle heure ? en fourbe ou inscrit ? droit de vote dans nos bottes, elle me botte, laisse béton, y m'a filé une beigne, j'lui ai filé un marron, j'lui ai filé mes bottes, il a filé chez ses potes, pas la peine de se faire des idées, y'en a pas pour tout le monde, les idées ne se partagent pas, que chez les convaincus d'avance et encore, alors les cons vainqueurs y z'ont qu'à s'y frotter et qui s'y pique parce rien n'est meilleur qu'une idée sur le plat, le plat des mots qui sortent de la bouche, comme un vertige qui s'éloigne un peu mais finit par trouver son précipice, le trou des idées, le trou dans la tête des conquérants, boeuf kilométrique et circulaire d'un lendemain qui chante, animal à cadre porté par les jambes de l'envie, et encore et encore, des mots kilomètres qui font mal aux jambes mais du bien dans la tête, la ligne de partage des maux, et encore et encore...eh-dit.